ECG des cardiopathies congénitales
ECG des cardiopathies congénitales : tétralogie de Fallot
Les cardiopathies congénitales atteignant l’âge adulte sont de plus en plus fréquemment rencontrées.
Leur nombre est évalué entre 100 et 150 000 patients en France. Cela est principalement le reflet des progrès de la prise en charge (essentiellement chirurgicale) chez l’enfant. Ces cardiopathies « réparées » nécessitent un suivi à vie spécifique. L’analyse ECG de ces patients est souvent riche d’enseignements avec des
informations diagnostiques, mais également pronostiques. Cette session, qui se voudra récurrente et éducative, tentera de s’attacher à décrire les aspects ECG particuliers des principales cardiopathies congénitales rencontrées chez l’adulte.
Nous commençons ce mois-ci avec l’ECG de la tétralogie de Fallot. Associant une communication interventriculaire, une aorte à cheval, une obstruction infundibulaire pulmonaire et une hypertrophie ventriculaire droite, elle fut décrite dès 1671 par Niels Stenson et analysée sur le plan physiologique par Etienne-Louis Fallot en 1888.
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Dans la forme commune sans autre anomalie associée, une chirurgie de correction est proposée après parfois une période plus ou moins longue de shunt systémicopulmonaire palliatif (anastomose de Blalock le plus souvent entre l’artère sous-clavière droite et l’artère pulmonaire droite). Les premières chirurgies (1955) associaient une large
ventriculotomie et une résection extensive de l’infundibulum pulmonaire parfois avec utilisation de patchs à ce niveau ainsi qu’au niveau de la communication interventriculaire (Figure 1). Une fuite pulmonaire importante était quasiment toujours induite. Les progrès ont permis par la suite une approche transatriale et transinfundibulaire permettant une préservation plus fréquente de la valve pulmonaire et un degré modéré de sténose infundibulaire. Quoi qu’il en soit, ces incisions et patchs vont prédisposer le patient aux arythmies, notamment à la mort subite (Figure 2).
infundibulaires (plutôt qu’une simple altération de conduction de la branche droite du faisceau de His).
Un bloc de branche droit quasi constant
L’ECG de l’adulte (Figure 3) ayant bénéficié d’une réparation complète est dans la plupart des cas évocateur. Il va refléter la pathologie ventriculaire droite associée aux lésions de la chirurgie correctrice. L’onde P ne présente pas de caractéristiques particulières, sauf en cas de fuite tricuspide importante fonctionnelle sur dilatation du ventricule droit avec aspect d’hypertrophie auriculaire droite. L’axe du QRS est typiquement normal ou dévié à droite secondairement à l’hypertrophie ventriculaire droite. Un bloc de branche droit est quasi systématiquement présent reflétant là aussi l’hypertrophie ventriculaire droite lorsque R’ en V1 > 15 mm. Le QRS peut être très élargi. Cet aspect de BBD est très atypique avec parfois une durée de QRS très variable sur l’ensemble des dérivations, et une durée maximale le plus souvent en précordial droit. Cela traduit des blocs de conduction focaux dans les zones incisées/excisées
Le suivi du QRS est capital
Le suivi du QRS dans le temps est capital car reflète la dysfonction et la dilatation ventriculaire droite, mais aussi permet d’évaluer le risque de mort subite (en cas de valeurs supérieures à 180 ms, risque relatif x 10). Des ESV peuvent être enregistrées, typiquement à type de retard gauche, issues du ventricule droit pathologique. Les tachycardies ventriculaires ne sont pas rares, tournant le plus souvent autour des cicatrices et patchs laissés par le chirurgien.